La femme qui n’avait pas pu.

Témoignage de X.

« Je suis infirmière, je travaillais dans un service de réanimation, nous avions reçu une femme de 43 ans qui venait d’accoucher à terme d’un bébé décédé (son premier bébé, après un long parcours PMA) et qui avait fait une hémorragie de la délivrance lors de l’accouchement.

Je rentrais dans son box à reculons, je ne savais pas quoi lui dire moi qui habituellement ai un contact facile avec mes patients.

Le fait de penser à sa douleur me tordait les boyaux et me donnait la nausée. Je prenais ses constantes, faisais ses pansements, passais ses poches de sang en murmurant à peine et je ressortais aussi vite que possible.

J’ai été une très mauvaise soignante, mais je ne savais pas comment faire autrement, j’avais envie de pleurer rien qu’en regardant cette femme, brisée par la douleur.

Alors je parlais peu et ressortais vite car j’avais les larmes aux yeux.

Et quand j’y repense, ma réaction me dégoute.

Et quand je lis tous ces témoignages de femmes racontant comment les soignants les ont aidées dans leur phase de deuil et de douleur, par leur gentillesse et leur écoute, je me dis que vraiment, non vraiment, j’ai été une très mauvaise soignante, et j’ai laissé tomber cette femme car c’était trop dur pour moi (quel égoïsme!).

Alors je vis avec ce sentiment et je fais au mieux pour être vraiment aidante, et chaque compliment de chaque patient me va droit au coeur, et me fait repenser à cette dame que je n’ai pas pu aider. »

57 réflexions sur « La femme qui n’avait pas pu. »

  1. Anne

    Dommage que dans votre formation ce type de situation n’ait pas été abordé… Ce n’est pas donné à tout le monde et ce n’est pas toujours possible d’improviser… Ce sont des compétences qui s’apprennent et qui s’exercent. Ne vous dévalorisez pas, vous serez plus à même de mieux répondre une prochaine fois.

  2. ANNAICK GRANIER

    Chacun fait ce qu’il peut, selon son ressenti ! Pourquoi vous fustiger ? Vous n’arriviez pas à parler à cette dame, peut être, si vous l’aviez fait en vous forçant, aurait elle ressenti votre malaise ? Peut être cela aurait rajouté à sa peine ? Votre problème n’était pas un manque d’empathie, mais un excès d’empathie ! Savoir trouver le juste milieu est difficile.

    1. Geneviève

      Je suis d’accord, c’est justement parce que vous étiez en empathie avec cette femme que les mots, les gestes restaient bloqués. Peut être que cette femme a senti votre “empêchement”, je le crois moi.
      Quand on lit votre témoignage sincère, on a (j’ai) certainement envie de vous consoler et certainement pas envie de vous juger…
      Soyez indulgente avec vous, soyons indulgents avec nous mêmes…

      1. Roche

        ce n’est pas de l’empathie mais de la sympathie (souffrir avec) que vous avez ressenti. Là est le problème: ne pas basculer de l’un vers l’autre!! Nous ne sommes que des êtres humains et parfois nos émotions prennent le dessus!! Heureusement que l’expérience nous aide et petit à petit on trouve plus facilement des mots pour les maux!

  3. Islita

    On fait tous ce qu’on peut, l’important c’est l’empathie et peut être que cette femme à ce moment là a aussi apprécié votre discretion et votre pudeur. Vous avez senti et compris sa peine, ne vous blâmez pas, tout le monde ne peut pas aider dans tous les cas et à tout moment. Vous en avez surement aidé d’autres et vous en aiderez d’autres. Merci pour eux.

  4. Chantal

    Et bien des fois c’est comme ça on ne peut pas…..parce effectivement on a des tripes et on prend de plein fouet la douleur de l’autre sans possibilité de distance !!! alors ne vous tourmentez pas vous faisiez partie d’une équipe et il y a bien quelque une ou quelqu’un qui a pu et su s’occuper de cette Dame. Le principal c’est de pouvoir passer le relai quand les circonstances parfois notre chemin de vie souvent ne nous permettent pas de faire face. Je vous embrasse.

  5. Chris, La Muse

    Oh non, vous n’avez pas été mauvaise. Vous êtes un être humain, avant tout.
    J’ai perdu mon bébé mort-né. Je me souviendrai toute ma vie de la sage-femme, elle s’appelait Éva.
    Elle n’a pas fait d’ingeusion (Si vous voyez ce que je veux dire), elle est restée discrète. Elle m’a dit que j’avais beaucoup de courage. Je lui ai demandé deux trois trucs, à ce moment-là, et pas avant, elle m’a répondu avec douceur.
    Je la remercie pour avoir été là, pour sa douceur. Et parfois, même souvent, je pense à elle, jeune soignante qui a dû rentrer le soir en pleurs.
    Je me permets de vous embrasser.
    Vous êtes formidable. N’en doutez jamais.

  6. SANNIER

    Vous êtes un être humain et donc imparfaite
    Vous avez été une mauvaise soignante, ce jour là… comme nous sommes tous mauvais parfois
    Le fait que vous en ayiez conscience vous aide a vous bonifier
    Courage et dorénavant, faites du mieux que vous pourrez

    1. Priscilla

      Je me permets de répondre, le fait qu’elle pense avoir été une mauvaise soignante ce jour là ne veut pas dire qu’elle l’a été, et votre affirmation me choque un peu.
      A mon sens , elle était au contraire tellement dans l’empathie qu’elle s’est trouvée submergée par ses émotions, et incapable de verbaliser, mais dans ces moments là je doute qu’il y ait des mots qui vous apaisent, et au contraire les banales platitudes d’usage sont exaspérantes. Il serait intéressant d’avoir le point de vue de la maman , il est peut être complètement différent.
      Voilà, je voulais juste intervenir sur le jugement porté, d’autant que je suis à la fois infirmière, et que j’ai été à deux reprises à la place de cette maman…

  7. anne C

    bonjour,
    que vous êtes sévère à votre égard !
    inhumaine ? ce n’est pas ce que je vois dans votre histoire. votre ? oui, l’histoire de vous deux. je vois deux femmes malheureuses. authentiquement malheureuses. avec congruence. avec empathie. et sans mots. Infirmière, vous étiez débordée par votre douleur. vous ne pouviez rien dire, qu’être là et faire les soins.
    Ce serait bien que vous essayiez de revoir vos gestes à l’égard de cette dame. n’étaient-ils emprunts de délicatesse, et aussi de désarroi certes ? ne traduisaient-ils pas douceur et compassion ?
    En fait, ces jours-là, vous avez osé afficher vos limites. peut-être pour la première fois…
    bien à vous,
    Anne C

  8. Le chêne vert

    La culpabilité n’a pas lieu d’être. Je suis sûre que cette femme voyait votre émotion, celle qui vous empêchait de parler. Vous auriez pleuré avec elle et ça ne l’aurait pas aidée. Chacun fait ce qu’il peut, comme il peut et le simple fait que vous mentionnez cette expérience montre que vous êtes une bonne infirmière. Tout le monde, je pense, vit ce genre d’expérience qui ne nous valorise pas mais parfois on est amené à vivre avec ses regrets. Moi-même, je n’ai pas été capable d’assumer la mort de ma propre mère que j’ai laissé mourir seule alors que j’aurais pu rester la nuit avec elle et lui aurais tenu la main, elle qui avait si peur de mourir. Prenez cette expérience avec courage et sûrement une prochaine fois vous ferez mieux. On ne peut pas être parfait du premier coup.

  9. Lys18

    Cette dame en souffrance a dû ressentir votre malaise,voire votre propre douleur face à elle.À quoi auraient servi les mots que vous n’avez pas PU prononcer? Votre présence,votre professionnalisme l’ ont certainement aidée davantage.
    Nous ne sommes que des êtres humains,donc faillibles.Ne culpabilisez pas,et avancez,avec courage et dignité.

  10. Veronique

    Nous avons toutes de ces moments ou l’kn q l’impression d’avoir rate notre intervention aupres d’un patient …pourtant le malade sait . Il sent que ce n’est pas de l’indifférence seulement de la peine et une douleur immense qu’on ne doit pas montrer pour ne pas ajouter à leur peine . Pourtant il ne faut pas culpalibiser vous avez été une très bonne soignante en respectant cette femme . Rappelez vous toujours qu’une main posée sur une main , une épaule ,non bras … C’est mille, dix mille , cent mille fois plus puissant que des mots
    Courage ! Nous excercons un métier magnifique avec des joies et des pleurs …quand trop c’est trop
    Je vous serré dans mes bras et vous fais un gros câlin si vous me le permettez

  11. Christine

    C’est difficile comme situation, pour les deux. Parfois il vaut mieux ne rien dire, et juste être douce dans votre comportement est déjà une aide.
    Elle a du voir que vous étiez mal et a du comprendre, et elle avait la tête ailleurs alors le silence est peut-être mieux.

  12. Annick

    Merci Baptiste pour cette preuve d’humanité.
    Tu voudrais pas organiser une grande journée débat / partage avec toutes les personnes bienveillantes de ton blog sur le thème : “Et si on apprenait à être et rester humains, tout simplement ?”

    Reconnaitre et avouer sa faiblesse d’un jour, c’est se pardonner et rebondir pour toujours.

    Merci
    Annick

  13. marie

    Pour avoir été à la place de cette dame, je peux vous assurer que dans ces moments, on n’a pas non plus envie d’être aidé au sens où vous semblez l’entendre … Les paroles de réconfort sont dérisoires, voire maladroites … La personne qui m’a le plus aidée, c’est le jeune homme qui travaillait à la chambre mortuaire. Vous avez soigné cette femme, et c’est ce dont elle avait le plus besoin à ce moment-là …

  14. Nathalie

    Mais comment la structure hospitalière gère-t-elle ces questions? Le personnel est-il formé? Y a-t-il une salle de deuil? Ce n’est pas juste une question de compétence personnelle.

  15. Emmanuelle

    AIder, c’est parfois juste compatir, et vous l’avez fait.
    Lorsqu’on pleure une perte, entendre ou voir que l’Autre a compris cette peine et en est touché est bien plus aidant que vous ne semblez le croire. On n’a pas toujours besoin de mots (surtout que dans ces circonstances, ils peuvent être maladroits)… juste de pouvoir pleurer sans être jugé(e).

  16. Vizzarri

    Vous êtes humaine avant tout et avez eu une réaction humaine:) Un sourire, des gestes doux peuvent autant dire si ce n’est plus qu’un flot de paroles:)

    Je vous embrasse:)

    Marielle.

  17. Sandra

    Bonjour “X”, et aux lectrices/lecteurs,
    Nous sommes et restons des êtres humains, même en tant que soignant(e)s,
    Nous sommes avec nos peurs et nos souffrances, même en tant que soignant(e)s,
    Nous sommes notre histoire, même en tant que soignant (e)s.
    Être dans la bienveillance et la compassion, sans nuire à soi ni à autrui est un apprentissage du quotidien, et les circonstances difficiles comme cet épisode que vous évoquez était un bout du chemin…nul doute que vous avez su tirer un enseignement du suivi de cette patiente (au vue de votre témoignage) et même si votre qualité de présence à cet instant là vous parait en décalage avec ce que vous vous imaginez que vous auriez “dû” faire… tout cela reste de l’ordre de l’hypothétique, de la supposition, et peut-être qu’à cet instant là, cette femme en détresse avait juste besoin des soins “techniques” que vous lui avez prodigués.
    Vaste sujet dont l’écrit est parfois limitant dans l’expression de nos pensées…
    Belle journée à toutes et tous.
    8Ī8

  18. Noémie

    Bonjour Madame,

    Je suis osteopathe dans une petite ville de province.

    Lors de mon parcours de PMA, il m’est arrivé d’annuler, pour de mauvaises raisons, et parfois, au dernier moment, des patients venant pour leur bébé, même s’ils venaient parfois de loin et avaient fait de la route.

    Je prétextais un malaise, une urgence imaginaire.

    Je laissais le cabinet vide avec un mot d’excuse sur la porte et revenais beaucoup plus tard, pour les RDV suivants.

    Parce-que certains jours, s’était trop difficile pour moi de soigner les enfants des autres, moi qui n’en avais pas et qui souffrais beaucoup avec des traitements lourds au effets dévastateurs sur mon corps et mon cœur.

    Je croyais pouvoir soigner ces enfants en prenant le RDV et au dernier moment, parfois, crises de larmes, trop dur pour moi.

    J’en ai laisse en plan effectivement.

    C’est comme ça.

    La vie est belle mais dure et nous sommes humains, juste humains.

    Je suis soignante mais je ne suis pas parfaite, je ne le serai jamais.

    J’ai aujourd’hui un enfant, j’assure toutes mes consultations, la vie est différente.

    Pour l’instant…

    Peut-être qu’un jour, d’autres difficultés me fragiliseront de nouveau.

    Je ne le veux pas plus forte que le commun des mortels parce-que je soigne.

    Je ne peux pas tout.

    Vous avez été la pour elle, vous.
    Vous avez assuré vos soins, mêle machinalement, c’était déjà beaucoup…

    Amicalement.

  19. Augustin

    Lettre à X

    Votre témoignage est touchant; vous n’êtes visiblement pas une mauvaise soignante, bien évidemment que non! On aurait tous des difficultés à faire ce que vous avez fait, et ne soyez pas dans le jugement, vous n’êtes pas jugée! Vous êtes même très belle avec vos failles, vos doutes et vos sentiments.

    Vous me faites penser à une histoire un peu semblable; je soigne une patiente encore jeune, 55 ans je crois, cancer gynécologique métastatique, phase terminale; elle sait ce qu’elle a, tout le monde le sait, moi également, je suis son anesthésiste.
    Et puis, c’est le 1er janvier, je suis de garde à la clinique, je fais ma visite. Je passe devant sa chambre, et combat dans ma tête, j’entre? je ne rentre pas? que vais je lui dire? surement pas “bonne année”…
    Je décide de ne pas rentrer, mais la petite voix de la conscience m’engueule tellement que je renttre dans sa chambre; on se regarde, je suis mal, les orteils tout crispés dans mes sabots; Elle le voit; elle me sourit, et avant que j’ai eu le temps de dire quoique ce soit, c’est elle qui me dit droit dans les yeux: “On ne se dit rien docteur, hein? vous êtes d’accord?”. Et moi, larmes; je m’assois au bord de son lit, et on se tient la main, et on laisse parler les yeux.

    Tout ça pour dire, que nos patients souvent nous aident à un point qu’ils ne savent pas.

    Etr vous, vos doutes font que vos patients ont une sacré chance de vous avoir, et s’ils ne le savent pas, ce n’est pas grave, vous êtes belle, ne changez rien.

    1. Jean-Luc

      Très juste, nos patients ressentent notre émotion beaucoup plus qu’on ne le pense et souvent une main posée sur le bras ou la main, quelques larmes versées ensemble, un regard, un soupire valent cent fois mieux qu’un long discourt. L’empathie qui s’installe délivre alors du non dit et du malaise relationnel.
      Se le reprocher telle X ne peut être le fait que d’une belle âme.

  20. Tsuvane

    Je me joins à tous les autres commentaires pour vous rappeler que vous n’êtes pas une mauvaise soignante, non, vous êtes juste humaine. Vos remords en sont la preuve. Vous étiez juste démunie, et votre empatie vous a desservi … mais c’est justement si vous en étiez totalement dépourvue que vous seriez une mauvaise soignante, non ?
    Encore une fois mon total respect à tout le personnel soignant, vous êtes des héros du quotidien.

  21. Bibi

    Non, vous n’avez pas été une mauvaise soignante mais la détresse de cette personne vous touchait tellement que vous ne pouviez pas faire plus. Votre émotion et vos regrets montrent votre humanité et je suis sure que vos patients doivent apprécier votre présence et vos soins.
    Parfois on ne peut pas apporter plus mais cela ne remet pas en cause tout ce que l’on peut apporter par ailleurs.

  22. Adrien

    Bonsoir,
    Je ne que peux faire écho à tout ce qui a été dit.
    Pour avoir vécu une situation bien différente mais terriblement traumatisante à l’époque je n’ai apprécié que les soignants qui manifestèrent leur compassion par leurs silences, leurs regards ,parfois un petit geste de la main, surtout leur professionnalisme
    Je n’aurai pas voulu entendre des mots qui n’auraient pu adoucir ma peine.
    A mon avis, les mots sont nécessaires avant,après mais rarement quand la douleur de la perte vient juste de frapper.
    Merci,Madame, pour votre partage si humain.

  23. Pascale

    “Ce qu’on ne peut pas dire, il faut le taire ” a écrit Wittgenstein.
    Cette phrase m’a longtemps accompagnée, aidée, perdue, énervée…
    Au long de 35 ans de pratique de la psychiatrie, j’ai reçu et reçois des témoignages : vous m’avez dit.. Vous avez su…ou pas… alors que je ne m’en suis pas rendue compte. Parfois je me suis crue très maline et suis tombée complètement à côté. Parfois ça a été vraiment bien, dans un instantané de la rencontre. Pas souvent. Dans mon expérience perso, idem : les soignants qui m’ont le plus touchée ne l’on que rarement su, et je veux croire que ceux qui m’ont fait du mal non plus. En tout cas je n’ai su le dire qu’une seule fois.
    Nous vivons des expériences de grande intensité émotionnelle, et ce qui rend l’exercice difficile est peut être la solitude, celle dans laquelle nous nous trouvons dans ces extrêmes, de ces passages, douleurs, mort…
    Alors peut être que ce qu’on ne peut pas dire, il faut essayer d’apprendre à accepter de le taire, et de laisser notre corps le dire à sa façon, par ces petits gestes du soin, si essentiels et profondément humains.

  24. Nadezda

    Vous avez fait votre travail et je suis certaine que vous l’avez fait avec douceur. Vous êtes tout simplement humaine puis nous avons tous vécu la même chose dans un domaine où l’autre.
    Il y a des années , un immense chagrin, je n’ai pas voulu être consolée et aujourd’hui quand il m’arrive d’y penser, parfois je pleure et je ne veux toujours pas être consolée, mon mari l’a très bien compris , il ne dit rien me donne un café avec un petit chocolat puis il s’en va.
    Cette jeune femme avait peut-être, juste besoin de vivre sa peine et de vous savoir là, silencieuse et efficace.
    Cordialement

  25. Giroflée

    On n’est pas des machines. On est simplement des êtres humains avec leurs faiblesses et leurs fragilités. Ne soyez pas si dure avec vous-même : vous faites un travail lourd de responsabilités et lourd émotionnellement. Vous faites au mieux chaque jour. Au mieux de vos moyens humains, matériels etc… N’oubliez jamais que vous êtes quelqu’un de Bien, vous apportez beaucoup de Lumière et d’Amour autour de vous votre récit en témoigne. Bien amicalement : )

  26. mammouth

    Je n’ai rien à ajouter aux commentaires précédents, certains très touchants. Je me joins à eux pour vous dire que je ne vous considère pas comme une mauvaise soignante. Restez à l’écoute de son ressenti est une bonne chose. La culpabilité et le jugement sont inutiles. Au fond, personne ne sait ce dont cette femme aurait eu besoin. Tout n’est que pure spéculation.

  27. Eliane

    Nous, les soignants, avons nos limites: qui peut dire avoir toujours été à la hauteur de toutes les situations dramatiques que nous avons croisé?(Si quelqu’un me dit oui, non seulement , je ne le crois pas, mais cela n’augure pour moi rien de bon pour sa qualité de soignant);Le simple fait que vous ayez ces interrogations est significatif de votre engagement et de votre sincérité dans le soin;courage et amitiés

  28. Natou

    Y’a des jours où on n’y arrive pas, à faire ce que le monde attend de nous. On est humains, donc faillibles, et là votre empathie, votre humeur de ce jour, tout ça à fait que vous n’avez pas fait ce que vous estimiez ”la bonne chose”… Ça nous arrive tous, quel que soit le domaine.
    Et vous savez quoi ? C’est pas grave, parce que 1) c’est humain et 2) des fois, ce qu’on croyait être la chose à faire n’était pas la bonne. Peut être que cette femme avait besoin de la solitude que vous vous reprochez de lui avoir fourni.
    Et ça vaut pour tous les métiers, avec des répercussions pour tous les métiers. Vraiment

  29. Stéphanie Couderc

    Ecoutez, au moins vous avez été là. J’ai eu le 15 février 1997 une hémorragie de la délivrance. J’ai perdu connaissance, et beaucoup de sang. Je me suis réveillée au bout de 6 heures. On ne m’a pas dit si ma fille allait bien, on n’a donné aucune nouvelle à mon mari pendant tout ce temps. Moi j’avais juste eu le temps de penser ” je vais mourir là, sans avoir vu mon bébé, sans avoir dit au-revoir, toute seule”. Les jours qui ont suivi mon médecin (qui n’était pas présent pour l’accouchement) est passé me dire que j’allais devoir manger beaucoup d’épinards, parce que j’étais en anémie sévère (haha). L’année qui a suivi a été un cauchemar. Je me sentais liquide, épuisée, vidée, et je ne pouvais pas m’occuper de ma fille comme je l’aurais voulu/dû. Je me suis remise, et 4 ans plus tard on a attendu un deuxième bébé. J’étais convaincue que “ça” allait recommencer et que cette fois-ci je mourrais. Le hasard (incroyable) a voulu que je croise au supermarché une infirmière qui s’était occupée de moi et surtout m’a reconnue. elle est venue me voir (j’étais à 7 mois de grossesse) et m’a demandé si j’avais prévenu l’obstétricien. Mais…de quoi? Elle était sur le cul qu’on ne m’ait pas expliqué tout simplement ce qui m’était arrivé. ELLE m’a dit: décollement du placenta, ça va sûrement se reproduire mais on y pare facilement quand on le sait. Effectivement. Au moment du passage des épaules de ma deuxième pépette on m’a injecté du Syntho, la petite est sortie et j’ai eu une délivrance artificielle, certes pas très agréable, mais je n’ai pas saigné et dans un peu plus de 15 jours je fêterai les 21 ans de mon aînée. Grâce à cette soignante que je ne remercierai jamais assez. Vous étiez LA.

  30. guilaine

    déjà énormément de commentaires …..j’apporte donc juste ma petite pierre. l’empathie, la compassion vont parfois au delà des mots….Parfois les patients ont juste besoin qu’on soit là et qu’on fasse les gestes dont leur corps à besoin. parfois c’est trop tôt pour parler ….parfois il faut aussi savoir se taire quand les émotions sont trop fortes. accepter aussi qu’on est là avec nos limites…prendre soin de soi aussi. se féliciter de tout ce que l’on a fait plutôt de ce qu’on a pas pu faire. tout mon soutient à vous .

  31. Annick

    J’adore ce blog, j’ai lu tous vos témoignages et je pleure, c’est tellement beau et émouvant. Moi je n’ai pas vécu de telles situations difficiles, mais j’ai fait un sejour de 3 semaines à la maternité quand notre petit loulou a decidé d’arriver le lendemain de Pâques un mois et demi en avance alors qu’on etait chez mes beaux-parents à 2h de chez nous.
    Et là je remercie tout l’equipe hospitalière : celle qui m’a accueillie et qui m’a dit “le col est ouvert à 3, on va vous garder”, l’anesthesiste qui arrivait tout juste à qui on a dit à peine arrivé, y a une urgence, celle qui avec douceur m’a dit ça va etre le moment, allez-y (moi qui accouchait de mon premier enfant et qui avait eu un seul cours sur “comment pousser”), elle m’a aidée. Je suis devenue maman, nous sommes devenus parents, j’ai eu mon bébé quelques secondes sur la poitrine, il allait bien mais ils l’ont monté en néonat. Et là aussi je remercie et j’ai beaucoup d’admiration pour toutes les equipes d’infirmières et d’aides soignantes qui se relayaient jour et nuit pour s’occuper de moi et de notre fils, qui m’ont aidée à entrer dans mon nouveau rôle de maman.

    Merci de faire tout cela pour nous. Pour vous qui faites des accouchements ou des soins chaque jour cela ne vous parait rien mais moi c’est la premiere fois que je me retrouvais à l’hopital et je me suis sentie tellement chanceuse qu’on s’occupe de moi comme ça.

    3 semaines après nous sortions plus que jamais prêts à être parents ! Et aujourd’hui la petite crevette d’à peine 2kgs et 45 cm a 7 ans

  32. Cricri

    Oui vous avez eu le courage de choisir une profession très difficile, même sans parole, le malade sent si les soins sont apportés avec empathie et douceur ! Ne vous dévalorisez-pas, c’est déjà bien d’être là dans vos fonctions et de les exercer du mieux que possible.

    Courage

  33. de Rosas Dominique

    Ca n’était pas de l’égoïsme, juste un grand chagrin ingérable à l’égard de cette jeune femme. Le jour de la mort de ma mère, mon frère a fait 700 kms pour l’incinération. Puis sans pratiquement desserrer les dents, avec un visage glacial, comme s’il nous faisait la tête, il a demandé à récupérer une grande poële à frire puis il est remonté sur Paris avant l’enterrement…
    Nous avons toujours gardé le sens de l’humour, même dans les pires moments et nous avons compris que mon frère était désespéré.

  34. AM

    Moi je crois que vous avez eu l’attitude apropriée. Cette femme était probablement dans une telle douleur qu’elle n’aurait pu soutenir la votre. Vous pensez ne pas avoir trouvé les mots, mais n’est-ce-pas simplement qu’il n’y en a pas…
    Pour ma part j’ai vécu une fausse couche en début de grossesse, certes événement peu comparable à ce qu’a vécu cette dame, mais la gestion des émotions est similaire. Je l’ai vécu avec mon généraliste puis avec un gynécologue obstétricien. La peine non dissimulée de mon généraliste qui m’a dit que quelque chose n’allait pas et ça recherche désespérée de mots réconfortants ont été durs à géré pour moi. J’avais déjà ma propre peine, je n’avais pas besoin de voir la sienne. De plus j’avais pas envie de parler, juste de rentrer chez moi. Le gynéco, lui plus habitué à ces malheurs, c’est montré plus froid, du moins en apparence. Ce qui ne l’a pas empêché d’avoir une façon de faire apaisante. Ceci a été plus simple à gérer pour moi et à eu pour effet de dédramatiser la situation. Je ne sais pas si ces deux situations sont comparables, néanmoins j’espère que mon commentaire et les nombreux autres allant dans le même sens, vous auront quelque peu réconforte. Dans la vie on fait parfois ce qu’on peut, mais souvent cela suffit…

  35. Laurence

    Madame X,
    retrouvez cette femme (c’est difficile et pas très déontologique mais possible et humain) et dites-le-lui.
    Pour vous. Pour elle.

  36. Hervé CRUCHANT

    Ce métier est inhumain.

    D’un côté des soignants qui soignent, de l’autre des patients qui attendent d’être guéris.

    Peut-on guérir la détresse? Tout le monde (même médical) est-il capable de la soigner ?

    Ce métier (de soignant) est inhumain par construction.

  37. Poulette Dodue

    Bonjour X et baptiste,
    X merci pour ce témoignage….courageux.
    Tu ( le net apporte une certaines familiarité) n’as pas été une mauvaise soignante !! Tu n’as pas pu sur le moment prendre le recul nécessaire et ça c’est le quotidien quand on travail avec l’humain.
    La rencontre avec cette patiente t’as permis de te “repositionner”. Les infirmières et les soignants vous ^tes des héros du quotidien

  38. Julie

    Ancienne IDE de réa ici. X, ma poulette, t’aurais voulu lui dire quoi à la dame? Dans les situation où on s’est senti mauvais en tant que soignants, c’est souvent qu’on a l’impression qu’on a pas fait un truc. Mais là… Franchement, dans un monde idéal et au top de ta forme, t’aurais fait quoi de plus? On le sait, parfois les situations sont tellement dramatiques que les mots sont inutiles voire nocifs. Reste la présence. Tu étais là pour elle, avec tout ton être. Moi ce que je retiens de cette histoire c’est ton immense empathie et ça c’est un merveilleux cadeau pour les gens qu’on soigne. Je t’embrasse.

  39. herve cruchant

    Soyez ce que vous êtes.
    Friedrich, philosophe, dit ” le Moustachu Bourru” disait: “Devenez ce que vous êtes.”

    Nous qui sommes un chouia plus bas dans la gamme des humains, soyons authentiques avec autrui et surtout ceux qui sont dans la détresse, cette horreur. J’avais dit ici que je suis contre toute compassion en général; non pas en raison de mon caractère d’insoumis mais parce que l’authenticité est toujours plus généreuse et fraternelle qu’un sentiment construit, naturel ou non. Même en restant coi, la présence, sentinelle repoussoir à la solitude, dilue le malheur.

    Madame Julie, qui nous dit être une ex du masque à gaz et, j’imagine, du tampon de chloroforme tellement dégueulasse qu’on peut avoir à subir quand on est petit, nous dit ces choses avec la rigueur technicienne d’une injection de curare savamment administrée : “Monsieur, vous m’entendez ? comptez avec moi de 1 jusqu’à dix…”. S’il existe un deal foireux, c’est bien celui-là . Foireux comme les petites lignes d’un contrat d’assurance sur la vie hors de prix qui vanterait la protection des praticiens anesthésistes ! Ah, misère ! Mais que soit pardonnée ma tirade pour rire, Julie. Même avec leurs plus savants mensonges, si nos gouvernants nous enfument, ils ne nous endorment pas. Revenons à mon cas, puisque c’est celui que je connais de plus près. Avant d’arriver à quatre, j’étais parti dans les limbes, votre main posée en caresse délicate sur ma joue. Et vos yeux, entre le masque crépon et la toque verte, casaque ton sur ton, m’en disaient plus que tout du monde duquel je m’étais finalement résigné à condition que ce fut avec vous pour toujours.
    Si un jour par hasard quelqu’un prétend que cette douceur indélébile n’est que geste professionnel, ayant pour but de calmer l’allongé soucieux de son avenir immédiat, je lui dirais peut-être que j’en veut encore.
    D’ailleurs, je m’y prépare chaque jour sans réel succès. j’essaie bien de répéter le plus souvent possible dans la rue des sains de corps et d’esprit de nos cités, mais çà ne marche pas toujours très bien, surtout depuis les affaires de harcèlements.
    Je crains plutôt de me voir attribuer une bouffe sauvage et cette petite peur entraîne une retenue néfaste à mon projet. Revenez en tête de gondole parmi vos bouteilles et vos en-cas de fuites de gaz, Julie. Quittez vos livres et vos queues de casseroles. Nous pourrions alors nous rencontrer de nouveau pour une séance opiomane de haute tenue. Considérant mon âge, ma vieillerie pourrait me faire cadeau d’un lachage de joint, un éclatement de durite localisé mais préoccupant , un court jus dans le câblage qui, avouons le, posé en plein conflit avec l’Allemagne nazillarde est largement obsolète depuis longtemps.
    Rejouons donc le compte de un à dix, le M’entendez-vous en rigolant sans faire de bruit pour ne pas déranger le chef d’orchestre. Et vous poserez votre main à plat sur ma joue. Et je verrais vos yeux et leurs petits éventails de ridules et ce grain de malice, puisque nous sommes dans un rêve.

    Ah, ces femmes du Sud…

    Que Mieux vous rende sereines et paisibles les Soignantes d’hier et d’aujourd’hui

    1. Cath

      À vous lire, un sourire me vient. Votre réponse réconforte et rejouit la lectrice et le lecteur, même si les souvenirs d’anesthésie diffèrent : moi, je me reveillais au milieu de l’opération, mettant en émoi chirurgien et anesthésiste, puis je prétendais continuer mon somme en salle de réanimation sans écouter les appels à me réveiller. L’esprit de contrariété en somme. Et la soignante attentive a plutôt tenté la baffe que le réveil en douceur. Je suppose que nécessité faisait loi. 🙁

      1. herve cruchant

        La vie est dure mais belle. Votre recette fonctionne-t-elle toujours ? Pour les discours politique et autres pow-wow lénifiants ?
        Merci. Vous pouvez vous rendormir…

  40. Lison

    J’ai moi-même accouché d’un enfant mort et en salle de réveil, une jeune infirmière a “essayé ” de m’aider. En fait, elle me saoulait avec son bla bla … je ne souhaitait qu’une chose : qu’elle se taise et me laisse avec mon chagrin.
    C’est bien aussi le silence.

  41. Popraph

    Ce que j’ai compris du mois que j’ai vécu en rea neo-nat pour mon fils, les équipes soignantes doivent etre des super heros, vous faites un métier qui demandent maitrise et précision face à des situations humaines parfois terriblement dures et en meme temps les patients vous demandent beaucoup d’empathie.

    Ce jour là vous n’aviez pas votre costume de super-heros vous étiez juste une belle personne sensible; pas de quoi se sentir coupable et je suis sur que le lendeman vous avez remis votre costume

  42. djé

    Quel soignant n’a jamais baissé le regard face à un patient parce qu’il ne savait pas quoi dire ?

    Personnellement je dis : “accompagner un patient par ses silences est parfois la meilleure chose a faire….”

    Tout ne passe pas par des mots…Des attitudes , des mises en retrait sont parfois ce qu’il y a de mieux….

  43. Anna

    ça arrive… on est des êtres humains et quand on fait ce métier c’est qu’on a beaucoup d’empathie.. parfois trop pour réussir à rassurer..

    Ce n’est pas un concours. Peut-être que qqn d’autre l’a aidé à vivre son deuil. Et pas sûr qu’elle vous en ait voulu. C’est humain. Personne n’est infaillible. Et puis ya des histoires qui résonnent en nous plus que d’autres.

    Et puis parfois dire des mots rassurants en faisant “style de rien” c’est pire que de faire preuve de sincère empathie, même si ça veut dire en avoir les larmes aux yeux..

  44. julie

    Pourquoi ne pas avoir pleuré avec elle ? Le chagrin ce n’est pas quelque chose qui se contrôle, autant chez les patients que chez le personnel soignant. Je ne crois pas que cette femme aurait pu comprendre autre chose que de l’empathie à sa douleur en vous voyant pleurer. Je suis assez convaincue que pleurer ça “fait du bien”. Il serait intéressant d’avoir l’avis d’un psychologue là dessus.

  45. mgx

    le simple fait de vous questionner sur votre posture fait déjà de vous une grande soignante.
    vous avez tout mon respect
    il est temps de vous pardonner 😉

  46. Garance

    Mieux vaut des interventions discrètes et efficaces que des effusions déplacées ou maladroites. Cette dame a peut-être apprécié qu’on la laisse un peu tranquille pour faire son deuil, après tout vous n’êtes pas psy, et vous avez le droit de ne pas être à votre aise par moment. Vous avez fait votre travail, ne vous flagellez pas pour une prétendue faiblesse parfaitement humaine.

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