Les femmes qui se levaient la nuit.

Petit hommage aux infirmières (à partager) Merci D.

ALORS VOILÀ, elles me disent qu’elles sont infirmières libérales dans un canton rural. Un cabinet de 7 nanas, de tous les âges. “Nous faisons notre métier avec passion. Mais loin de nous le tralala bisounours qui peut y être associé ( le mythe de la vocation, le plus beau métier du monde, bla-bla-bla…).”

Elles me disent qu’elles savent que l’Humain peut être magnifique ou vil, dans les rapports relationnels comme dans la maladie. Elles voient de tout, de 7 à 77 ans comme dit la chanson, du bon, du mauvais, de la jeunesse et de la vieillesse. Ce sont leurs vies. C’est comme ça.

Il y a 2 jours elles ont enterré une patiente aimée, c’est ça qu’elles disent, “aimée”. 3 ans de soins, 3 fois par jour. Foutu crabe. Le temps passant, elles se sont attachées à la patiente. Elles connaissaient la vie de Mme Bella et Mme Bella connaissait les leurs. Puis Mme Bella est devenu Jacqueline, puis Jacqueline est devenue Jacquie, comme dans la phrase “Alors comment ça va Jacquie, aujourd’hui ?”.

Elles formaient une team, la “team bagarre”.

Elles évoquent les aller-retours nocturnes, parfois -souvent- pour rien : une pompe qui sonne, par exemple, un appareil débranché. Elles me parlent des petits pots pour bébé achetés spécialement pour elle, car Jacquie ne pouvait plus manger. Elles me parlent des cartes postales envoyées durant leurs vacances parce que “on voulait la faire voyager, au moins par procuration”. Elles me disent qu’elles ont fait leur métier. Sans calcul. Avec du coeur, de l’entrain et de l’huile de coude. Sans rechercher de gloire ou de reconnaissance. Mais elles ont été là jusqu’au bout, même quand le poney multicolore est passé. 

Alors quand, à la fin de la cérémonie religieuse, la famille a eu un mot de remerciement pour tout le monde, sauf elles, elles ont eu l’impression de recevoir sept claques. Une chacune.

Elles sont ressorties la tête basse, le coeur en berne. 

“Nous sommes des saint-Bernard, disent-elles. Le chien avec le tonneau de rhum, hein, pas le bonhomme avec une auréole ! Le saint-Bernard fera toujours son travail, vous réchauffera, vous donnera le rhum, et parfois même une léchouille. C’est normal, c’est son boulot. Un boulot de chien.”
——-

Merci à tous pour vos gentils mots ! J’en profite pour vous dire que je serai le 21 mai à la librairie Lire aux éclats 26 avenue des Pyrénées 31830 Plaisance du Touch. De plus, en attendant que mon futur roman soit dans vos librairies (je lui fais une petite beauté avant de l’envoyer à mon éditrice) je vous réserve une surprise pour début juin. Indice : c’est pour la bonne cause et en prestigieuse compagnie. Vous avez des idées ?

67 réflexions sur « Les femmes qui se levaient la nuit. »

  1. Julie

    Alors un grand merci aux infirmières. A ces sept femmes qui, en plus d’avoir pris soin de Jacquie, ont apporté soutien, chaleur, rires, évasion… un peu de vie quoi.
    Er merci à ceux et celles que je croise lors de mes visites à domicile. A ceux et celles qui prennent un peu de temps auprès des hommes et femmes fragiles et vulnérables… Un peu de temps, même lorsqu’ils n’en ont pas assez.

  2. carolaluciole

    J’ai ( hélas ) aussi accompagné ….. jusqu’au bout . mais toujours un gentil mot pour moi dans les remerciements ( peut être du bol) .. je me serais aussi sentie mal si rien …. mais c’est la vie.. je ne suis pas infirmère mais Amp Alzheimer … et je partage aussi beaucoup de temps avec mes personnes “aimées” ( très joli terme je garde ) ………………….
    Des bises …plein !
    Caro

  3. Christel

    Merci aux infirmières, infirmiers, aide-soignante, aide-soignant, ambulanciers, qui ont accompagnés ma mère lors de ces séjours à l’hôpital et lors de son dernier séjour en palliatif. Merci à cette infirmière qui faisait danser ma mère lorsqu’elle devait la passer du fauteuil au lit et du lit au fauteuil. Merci à cette autre infirmière qui était là quand le poney multicolore est passé et qui lui a tenu la main.
    Merci aux infirmières, infirmiers, aide-soignante, aide-soignant, ambulanciers, aux bénévoles qui ont accompagnés ma grand-mère lors de son dernier séjour en maison de retraite, qui lui ont permis de voyager (Lourdes toute une aventure à 95 ans !), qui lui ont tenue la main lorsqu’il a fallu lui annoncer la mort de sa fille et qui ont su trouver les mots pour lui permettre de rejoindre le poney multicolore en paix.
    Je ne leur ai pas dit merci à ces femmes et à ces hommes, trop prise par ma douleur alors je profite de ce post pour le faire. Merci à vous.

  4. Fabymary POPPINS

    Beau témoignage et hélas si vrai, combien se disent, elles sont là pour ça, et pourtant, mon fils est un des ces infirmiers libéraux en milieu rural aussi et, le métier va bien au delà des soins, il a voulu se diriger après la psychiatrie dans le libéral pour cette proximité avec l’humain, mais ça sous entend aussi ses heures qu’on ne compte pas, ses allers retours pour juste un médicament contre la douleur… et les situations ( ça c’est pour le fun) ou des oies te poursuivent, des chiens….. infirmier en campagne c’est aussi ça. Bonnes dédicaces Baptiste et vive le nouveau livre!!!

  5. leslie

    Un bel hommage aux infirmières ! Moi aussi je profite de ce commentaire pour remercier toutes celles qui se sont occupées de moi et des membres de ma famille, en diverses occasions <3
    Et sinon je n'ai pas d'idée pour la surprise… Mais hâte de savoir!
    Dernier point mais non des moindres : "Wouhou! Plaisance, à 10 min de chez moi!!!" Vraiment cool ! <3

  6. josecile

    Je crois que tous ceux qui ont eu à faire avec des infirmières pourraient parler de leur empathie, de leur sympathie et de tout ce qui peut les rendre parfois indispensable. Mon Papa a eu une chimio “à domicile” il y a peu, avec passage régulier des infirmières de son petit village de campagne. Ils les attendait presque comme une récompense, un petit vent frais dans une journée chaude.
    Alors à elles, à celles qui ont refait et refait mes pansements quand j’ai eu l’excellente idée de me verser l’eau bouillante de cuisson des pâtes sur la main (ben oui, fallait y penser quand même) et pour toutes les autres qui apportent en plus des soins du réconfort et une présence, MERCI !

    Et puis, ” un canton rurale” sans “e” à la fin, c’était bien aussi ! (je ne sais pas mettre des symboles, sinon j’aurais mis un clin d’oeil)

    1. Cath

      Smiley mode d’emploi
      Espace deux-points: ou point-virgule; suivi immédiatement de parenthèe ) espace et envoi
      Espace;)Espace. 😉

      1. Véro

        Oui, un grand merci à tous ces soignants.
        Mon beau-frère ne nous donnait plus aucune nouvelle. Il a disparu un jour sans que nous sachions où. En fait, des problèmes financiers, qu’il taisait, l’avaient amené dans la rue, plus exactement dans les bois, derrière le château de Versailles. Bien sûr, pas de carnet d’adresses, pas de numéro de téléphone, tout lui a été volé au fil du temps. Il y a passé 4 ans. Un soir de 2008, une infirmière a appelé ma belle-maman en lui demandant si elle était bien la dame qu’elle recherchait depuis plusieurs semaines. Oui, c’était bien elle, la maman, qui apprit, ce jour-là, que son fils était en soins palliatifs et que ses jours étaient comptés. Nous avons réussi à le voir une dernière fois conscient et cinq jours après, il rejoignait son père, sereinement. Bien sûr, nous avons remercié les infirmières pour leurs recherches et leur accompagnement auprès de lui, auprès de nous. C’était à la Verrière, dans les Yvelines.
        Bien sûr, nous avons été touchés par leur dévouement, bien sûr nous les avons remercié. Mais ce qu’elles ont fait dépasse les mots de notre vocabulaire. C’est au fond de notre cœur que cela se passe et comme vous le dites, les mots s’effacent devant le chagrin.

  7. DOMINIQUE

    Mon père a été soigné par deux adorables infirmières, chez moi pendant trois années. A la fin, c’était de plus en plus dur. Elles étaient joyeuses, douces, attentives… puis mon père est décédé.
    J’ai téléphoné à l’une des deux, elle a éclaté en sanglots. L’autre m’a rappelée, la voix toute tremblante. Mon père était leur premier patient, quand elles se sont installées en libéral.
    Six mois plus tard, j’ai eu besoin d’une piqûre. Bien sûr, je les ai appelées. Isabelle a frappé à la porte, j’ai ouvert, et… j’ai éclaté en sanglots. On s’est retrouvées dans les bras l’une de l’autre, comme deux sottes, sans pouvoir parler.
    On s’est revues quand ça a été le tour de belle-maman de venir finir ses jours chez nous (un an).
    Je ne sais pas comment j’aurais pu traverser tout cela sans elles.

  8. josette

    j’ai 2 infirmières qui viennent à mon domicile chaque semaine depuis 1993, et 2 autres l’été, tous super gentils, parfois un peu trop présssés, parce qu’un autre patient les attend…..Elle ne le saura surement jamais, mais une a particulièrement toute ma sympathie , elle s’appelle Noémie et exerce son métier en Vendée, toujours cette voix douce , elle pourrait être ma fille voire ma petite fille!!!!

  9. Michelle

    Merci merci à ces infirmières libérales ou celles de l’hôpital qui ont accompagné ma mère. Merci à Sylvie , Isabelle qui viennent deux fois par jour quelque soit le mauvais temps, les samedis, les dimanches pour s’occuper de mon père. Elles laissent leurs vies, elles font des kilomètres avec toujours le sourire et la bonne humeur. MERCI….

  10. Pierre

    Toujours aussi agréable Baptiste.

    Allez, j’ai envie de jouer :
    – bonne cause : Croix Rouge ?
    – prestigieuse compagnie : Adriana ?

    Dis moi pas qu’cest pas vrai !

  11. Cath

    Je dirais bien qu’il y a des claques qui se perdent, mais à quoi bon ?
    Elles font leur travail comme elles disent… Et ce n’est pas un travail facile. Merci à elles.

  12. Cécile

    D’abord merci Baptiste pour ton blog, ton humanité, ta générosité et tes partages. J’ai repris à 41 ans, avec trois enfants et déjà une belle vie professionnelle, des études pour devenir orthophoniste, je serai bientôt diplômée. Du coup, ça fait 4 ans que je suis en fac de médecine. A l’heure où les ergothérapeutes et les psychomotriciens passent maintenant par la 1ère année de médecine et où il semblerait que les infirmiers (et pourquoi pas bientôt aussi les orthophonistes), se dirigent lentement mais sûrement vers le même passage obligé, je me pose de sérieuses questions de ce qu’il adviendra de ces professionnels qui seront inf’ parce qu’ils ont été “trop mal classés” pour être médecin, le haut du panier, et qui ne feront pas forcément ça par choix… Est-ce bien sérieux, pour nous tous, de choisir un métier de soignant par défaut ?
    Merci encore, gros klem (= hug en norvégien 😉 ). Tu viens quand à Mulhouse ?

    1. Libellule

      Cécile :
      oui, tous les paramédicaux y passeront, parce qu’il y a une volonté politique de reclasser les (90% ?) d’étudiants qui échouent au passage en médecine après 1/2 années de PACES et qui ont coûté une année de formation. Et les infirmiers ont du bol, car leur métier est connu, donc ce sera un 2ème choix mais pas le choix par défaut “j’ai eu que ça et / c’est un métier de larbin, qui paye pas / je sais pas ce que c’est un ergo ou un psychomot’ / c’est dégueu de soigner des pieds pourris toute la journée” (déjà entendu dans les instituts de formation).
      Je comprends la volonté de reclasser ceux qui échouent en médecine (dans les 90% je parie qu’il y a de futurs très bons soignants). Le problème, c’est de classer uniquement sur un écrit technique bien souvent éloigné du métier, la biochimie cellulaire par exemple. Il faudrait VRAIMENT un oral de motivation !!!
      hugs

      1. Cécile

        Qu’il faille reclasser, je peux comprendre et je suis super d’accord pour l’oral de motivation qui devrait même être un préalable ! Maintenant c’est quand même dommage de se trouver écarté d’une profession parce qu’à un seul QCM on a été moins bon que d’autres… Bon sang, c’est quand même de soin qu’il s’agit, pas d’un boulot d’été ! En 1ère année d’ortho à Strasbourg il y a 7 personnes sur 35 qui sont en reconversion, comme je le suis. Nous savons exactement pourquoi nous sommes là et pas ailleurs, en prendre pour 4 (et maintenant 5 ans) avec une famille, c’est un engagement qu’on ne prend pas à la légère, un travail d’équipe. S’il avait fallu en passer par le PACES, ça n’aurait pas été possible, juste parce qu’à 40 ans avec des mômes et 3 heures de transport par jour, on ne peut guère passer une année de dingue à se bourrer le crâne de trucs qu’on n’utilisera peut-être jamais dans notre profession et pour un concours où il y a si peu de places… Je ne sais pas quelle orthophoniste je serai, mais pour en connaître d’autres dont c’est la 2ème carrière, je pense qu’on a des choses à apporter, différentes de celles que peuvent apporter ceux qui réussissent le PACES, mais pas moins riches. Ce ne sera plus possible et c’est VRAIMENT dommage à une époque où on nous dit qu’il faudra être flexible, capable de changer de métier, tout ça tout ça…
        Bravo et merci aux 7 formidables, je suis sûre que Jacquie, elle, ne vous a pas oubliée.
        Un coucou à Carabosse, qui leur ressemble, merci d’être là 🙂

        1. Libellule

          Je suis tout à fait d’accord avec vous. Pour les reconversions, il y a dans beaucoup d’institut la possibilité d’entrer sur dossier (et oral de motivation !) donc hors PACES… Pourvu que ça dure…

  13. mimi

    Bel hommage que je tiens à partager en particulier concernant les infirmières de mon petit village. Beaucoup de boulot, des journées très très chargées et toujours cette patience, cette gentillesse, cette disponibilité.
    Elles sont venues durant près d’un mois et demi, tous les matins.
    Un souci en fin de journée… Une grande hésitation de ma part pour les déranger un samedi soir. Mais, pas de solution.
    Elle est venue, sourire aux lèvres en nous précisant que nous avions eu raison et qu’il ne fallait surtout pas hésiter !
    2 jours après, l’une d’entre elle a appelé le chirurgien qui n’a pas daigné répondre. Mais c’est une autre histoire…
    Un grand merci à toutes les deux.
    Bonne journée.

  14. Libellule

    Aux 7 samouraïes 🙂
    Ça n’excuse rien, mais peut-être que la famille a fait un blocage parce que vous étiez là au moment du décès, et qu’ils vous ont associées inconsciemment à ce moment trop difficile à affronter ??? J’aimerais le croire, sinon vraiment ils sont nuls !!!
    En tout cas, même sans vous connaître je vous aime bien 🙂
    Prenez soin de vous mesdames !

  15. Cia

    Merci à vous, Mesdames les 7 infirmières dont j’aurai aimé connaître le nom. Comme je comprends votre tristesse. Pardonnez à la famille de Jacquie. Dans la douleur et le deuil on est parfois si perdu ! Peut être pourriez-vous, dans quelque temps, expliquer à la famille de Jacquie que vous vous êtes senties oubliées ? Une chose est sure, ce que vous avez offert avec tant de bonté en accompagnant Jacquie n’est pas perdu. cela a changé Jacquie, cela vous a changé, cela a changé des personnes autour de vous et autour de Jacquie.
    Pour cela, vraiment, merci.

  16. grand33

    Bonjour Bibi,
    Les infirmières (ou infirmiers d’ailleurs) de campagne sont vraiment des wonderwomen. Elles avalent les kilomètres, voient beaucoup de patients, amènent toujours leur sourire et leur bonne humeur, de la vie en somme. Et c’est souvent pour beaucoup de personnes âgées, notamment, le rayon de soleil de la journée.
    Enfin bref, j’aime bien les infirmières; Et là, Bibi tu m’en offres 7 ! alors c’est nickel je me permets de les embrasser toutes les 7.
    Cela pourrait faire un film : “Le grand et les 7 infirmières”, mais là je crois que je dérape ………
    La bise

  17. Hervé CRUCHANT

    ” J’ai peur. J’ai peur de tout. J’ai peur de parler la langue des autres parce, s’ils me comprennent, ils verront alors que je n’ai rien à dire. J’essaie d’écrire des choses de moi mais j’ai peur, mais je n’y arrive pas : je suis faux Bic. J’ai peur du Noir du troisième parce qu’il chante tout le temps en descendant l’escalier. Il chante tout le temps la même chanson au même endroit. Quand il arrive sur la palier du premier étage, il clame son chant en bantou ou en swahili, de là, je reconnais pas l’orthographe, avec des grands Hoû ! Moûmh…hoûl-lllaaaah. La lumière s’éteint à ce moment laaah et je sais pas si c’est la minuterie ou le vaudou qui fait çà. Au début, j’étais sorti pour voir qui c’est qui faisait ce bruit là. Et j’ai regardé vers les marches du haut au moment où mon voisin arrivait à deux marches de moi. J’ai vu d’un seul coup juste ses yeux et son grand sourire et à ce moment là il en était à “Hoûl-llll”. J’ai eu très peur parce que j’ai toujours peur. J’ai dit “…Hââ !” et lui a dit : “Bonjour, Monsieur. Passez une bonne matinée…”. Il est professeur de Civilisations Américaines pré-colombiennes spécialisé dans les Tanos. Une tête dit-on. Moi, je crains les prés colombiens; paraît qu’ils font pousser la coca pour les moissons vaseuses des cow-boys et que la CIA les envoie en Hollande pour les vendre aux Russes antipoutine. J’ai peur des Russes aussi; ils l’ont dit à la télé : il y a plein de guetteurs russes chez nous qui regardent partout en attendant et on les appelle des attentistes parce qu’ils vont dire à un moment aux attenteurs des attentats quand ils pourront attaquer les banques. Oui. C’est mon banquier qui me l’a dit et aussi qu’on devrait avoir un peu plus peur parce que çà nous rendrait plus prudents. Voilà. Et à part les Russes et les casseurs parmi lesquels on retrouve les casseuses qui devraient être à leur place, normalement; que normalement c’est quand même leur cuisine, non?, et bien, on retrouve même des femmes, si on peut leur dire ce mot, qui sont A LA FOI dans les groupes des uns et dans ceux des autres. Et aussi des femmes qui sont écrites sur la poitrine des slogans ou des mots durs pour ceux qui savent de quoi on cause en général. Oui oui ! des femmes. ON a dit à la télé -c’est monsieur Pernod-Ricard qui l’a dit au journal de midi, je crois : le monde est peuplé en majorité de femmes. Cinquante deux pour cent. C’est bientôt une demi centaine, si on regarde bien. c’est terrible, çà !

    Moi, ces choses là me font peur. Tout me fait peur parce que je suis prudent de nature. J’ai été élevé par des parents qui ont toujours choisi la raison pendant les guerres de France. Et nous on est de bons citoyens, dans un sens : on respectera toujours la majorité. Qu’elle sorte des burnes ou qu’elle soit dite en passant. Si c’est un sondage aussi. Un sondé, c’est pas n’importe qui, on doit en tenir compte comme un autre homme et encore plus si cet homme là est une femme majoritaire.

    Alors, moi, j’aime bien les femmes, forcément.
    Et puis j’aime aussi les Infirmières. Elles me font pas peur.
    Parce que c’est elles qu’on voit tout le temps quand je vais à l’hôpital.
    Elles disent Comentalévou en souriant gentiment quand j’arrive. Elles se trompent de malade, surement, et me prennent pour un Grec ou un Albanais. Moi, c’est pas çà, mon nom…
    Avant les grandes grèves et l’insurrection, en 16, tiens, ben avant que j’ai reçu ce coup derrière la tête par un gendarme, on m’appelait “Manu”. Je me rappelle plus bien mon nom pour de vrai….
    Mais je m’en fous. Manu, c’est bien…

    Ah, je vous quitte. La belle infirmière que les autres appellent “Doum La Reine ” me fait signe; je dois y aller…
    A tout à l’heure.
    N’ayez pas peur.
    Je reviens….”

    (nb : sans code du travail, comment les Infirmières vont-elles aider les mamans à accoucher? même pas peur ! elles ne manquent pas d’air et savent redonner du souffle, cool, attentives et décontractées, nos Indispensables… et merde aux mercis qui manquent.)

    1. lectrice boulimique

      Hervé, une bouffée d’oxygène ton texte, un antidépresseur (sur)naturel, fais-en un bouquin comme Bibi, le sien et le tien devraient être remboursés par la Sécu 😉

  18. genevieva

    je tiens à donner une part de la vie des trois infirmières qui venaient tous les matins même le dimanche à tour de rôle, faire la toilette de mon mari et la piqûre une fois par mois, lorsqu’il ne put le faire lui-même
    elles étaient formidables, gentilles, souriantes, nous buvions un café le matin cela leur donnait la pêche pour la journée qu’elle allait passer avec d’autres malades et à NOEL je leur offrais des bons chocolats de la GATERIE pâtissier célèbre et excellent. Lorsque le matin où ils perdit tous ses repères il tombait sans arrêt et j’eus un mal fou à le relever elle fut là et m’aida à le porter dans son lit, heureusement qu’elle arrivait tôt le matin, je l’avais veillé toute la nuit car étant complètement perdu il voulait se lever sans arrêt et il dormit très mal. Je ne remercierais jamais assez ces trois femmes

  19. Isabelle

    La mort appartient toujours à la famille…
    Les remerciements ou témoignages de sympathie des familles sont déjà rares quand tout va bien…
    N’attendez de ce métier que votre propre joie et satisfaction à l’exercer pour gagner honorablement votre vie. La reconnaissance et l’estime doivent venir de l’intérieur, ça protège de l’usure!
    Un médecin.

    1. Hervé CRUCHANT

      “N’attendez de ce métier que votre propre joie et satisfaction à l’exercer pour gagner honorablement votre vie.”(sic)
      Justement, là, on ne parle pas seulement de métier mais d’humanité. Quand il sera question de tâches, nous ne manquerons pas de faire appel à vous.
      Un impatient.

      1. Isabelle

        Vos jugements sont hâtifs Monsieur.
        Je prétendais que la joie doit d’abord irradier de soi et que dépendre du merci des familles peut rendre malheureux.
        Mon humanité va bien et mes patients aussi, merci!
        Le médecin vous salue bien!

  20. Sorraine

    Il ne faut pas en vouloir aux familles, qui appréhendent leur deuil comme elles peuvent, et souvent mal. La recherche de reconnaissance, c’est une mauvaise idée, jamais suivie d’assez d’effets.

    Après tout, si la Dame leur en a été reconnaissante, elle. Et si elles ont pu faire en sorte que pour elle, ce soit mieux, alors… Tout est bien.

    La famille peut bien les oublier, elles, elles ne peuvent pas oublier qu’elles ont bien fait. Et çà, çà doit compter, devant un miroir, pour elles. C’est mieux que mille louange, la satisfaction d’avoir été droit, d’avoir bien fait. Comparer çà au chien qui gémit, je trouve çà rude, voire abject. Elles ne gémissent pas, elles font. Elles ne sont pas comme le chien, en quête d’une perpétuelle caresse. Elles sont de bonnes personnes, qui ont été payées pour leur travail, et qui l’ont bien fait, même mieux que bien, et çà, aucun oubli ne le leur enlèvera.

    Le sacrifice de son temps ne devrait pas devenir un enjeu de reconnaissance. Et je suis sure que même en sachant çà, elles auraient fait tout pareil. On décide d’être à un moment, quelqu’un de bien, sans se perdre pour autant. Vous parlez un peu à la légère de “vocation”, où je ne vois que du bon sens humain.

    C’est comme si l’humanité, le bon geste, devait forcement être un sacrifice intenable? Je ne crois pas, je crois que le bon geste est le geste heureux. Et je ne crois pas non plus qu’on doive se sacrifier pour le faire! C’est juste ce qu’on fait pour se sentir bien, un humain parmi d’autres. Et certainement pas pour que cela devienne un débat en place publique, ni une raison d’agonir des gens qui péniblement enterrent un membre de leur famille!

    L’ingratitude de la famille n’est qu’un détail, un peu énervant, mais à ranger parmi d’autres détails irritants. Comme un bouchon sur la route, en somme. Parce que si çà se trouve, plein de gratitude, ils sont, mais ils n’y ont juste pas pensé, pris dans des préoccupations plus immédiates, comme essayer de complaire à la grand tante encore en vie, et au beau frère athée, et à… bref!

    Tirer à boulet rouge sur les familles n’augmente certes pas l’intérêt de faire juste son travail correctement.

    1. adèle

      @Sorraine J’aime beaucoup votre commentaire.
      Je comprends le ressenti de ces 7 infirmières mais j’y lis un moment de doute, de désarroi, de fatigue face à l’ampleur de leur tâche. Etre infirmière, c’est en quelque sorte vider le tonneau des danaïdes : on n’en voit pas le fond, toujours plus de souffrances humaines à essayer de soulager …
      Ces excellentes infirmières savent que la gratitude des patients n’a rien à voir avec la réalité des soins (physiques et “moraux”) prodigués. Le vécu de chacun, patient ou soignant, fait que le soignant est tour à tour encensé comme le messie ou vilipendé sans que la raison y est parole à dire.

      Nb De façon générale, je m’interroge sur la légitimité de la présence des soignants aux obsèques de leurs patients.

      1. Hervé CRUCHANT

        Heureusement que le coup de gueule est aussi un coup de cœur, souvent ! Quant à “la légitimité”… ce n’est vraiment pas sa place au rang des sentiments.
        Puisqu’il faut toujours expliquer…
        Ma petite sœur s’est défenestrée du premier étage un beau jour d’été angevin dans un geste pseudo-suicidaire. Elle avait une vingtaine d’année. Polytrauma surtout atteinte des membres inférieurs, elle a décidé de rester dans un fauteuil alors qu’elle aurait pu remarcher normalement parce qu’ainsi on s’occupait d’elle. Je peux dire, en toute tendresse fraternelle, qu’elle a bien emmerdé tout le monde et qu’ainsi, en quelque sorte, elle a bien vécu.
        Grâce aussi à un toubib, je crois psy, qui avait pris son cas à bras le corps et qui me disait que tout allait dans le bon sens bien que le tableau soit lourd pour la stabiliser physiquement et psychologiquement.
        Elle est morte d’un arrêt cardiaque à cinquante ans, en faisant un transfert de son fauteuil à son lit. Son aide l’a trouvée ainsi, en arrivant le matin.
        Elle a été inhumée à côté de nos parents dans un coin plat des hautes alpes, dans un hameau où des troupeaux entiers de moutons bruissaient encore il y a quelques dizaines d’années. Autour du cercueil, il n’y avait pas grand monde. Juste son médecin qui était venu dire un mot, lire le papier sans lequel il aurait surement été noyé par ses larmes : “on était en train de réussir…on était en train de gagner…” m’a-t-il dit. Je n’avais jamais vu un spécialiste ému comme çà, malgré son vécu. Il avait rendu les armes. Illégitimement.
        Ma texture fait que je suis très en retrait des évènements tragiques. Ainsi, je peux être techniquement utile. Puis la colère muette arrive, se mue en détermination butée… Mais tout à une fin. Même les pires évènements. Comme un secouriste, il faut ranger ses outils, rentrer dans sa vie commune. Quand ces instruments là sont d’amour et d’affection, ils marqueront longtemps la mémoire. Et, au-delà, le fourbi refoulé de l’inconscient.
        Alors, “fais ceci” “fait cela” “n’attends pas de la vie qu’elle” “c’est pas comme çà que” “illégitime”… je vous rends tout çà, je vous en remercie, ce n’est pas pour moi.
        J’ai trouvé dans mon histoire sisyphe personnelle des soignants qui refusent la compassion parce qu’ils n’admettent pas cette idée de partage hypocrite et convenue de la souffrance inouïe des familles écorchées par la mort d’un proche. D’autres qui ne peuvent pas croire, foncièrement, que leurs années de galère passées à apprendre, savoir, faire la médecine sont impuissantes face à la fin de vie. Perfs, soins, ceci, celà, tout bien légitime… Mais la main que l’on prend dans la sienne, sac d’os emballés à la va vite dans une peau sans trop de chairs qui en ont assez de porter, de caresser, de faire la cuisine, de vivre, juste chaude par habitude d’être ou par le souffle de la clim’… est-ce bien raisonné ? Assis d’une fesse sur le rebord du lit comme un qui a quelque chose de plus urgent à faire que de s’occuper d’une vieille qui meurt naturellement -comme s’il était naturel de mourir!-, appelé dans la chambre 32 par un crabe impatient… J’en ai vu des grossiers, des nantis, des hâves, des laids à faire peur, des doux, des sévères… Où mettent-ils donc leur angoisse, leur peine, leurs fugaces désespoirs?
        Dans une pièce centrale, dans le couloir curieusement large, par une porte bizarrement large -c’est à ces mensurations que l’on sait être dans un lieu de santé civilisé avant d’autres signes plus explicites- règnent deux ou trois dames. Assises écrivantes sur une table quelque rapport, quelques remarques, avec des propos d’hôtelières: “dis Jeanine la 27, c’est Madame Gémal ? elle sort bien demain matin? Faut que j’avertisse l’accueil…”. Elles sortent parfois de ce havre comme un bernard l’hermite, vont faire des choses secrètes aux alitées, choses que l’on invente et qui sont fausses derrière les portes refermées sur un excusez-moi.
        Pour finir, quand elles savent que la vieille meurt de mort naturelle et que personne ne vient jamais la voir, elles lui prennent la main, sac d’os emballés à la va vite dans une peau découragée tachée, fissurée, cicatrisée, sans trop de chairs contenues, qui en ont assez de porter, de caresser, de faire la cuisine, de vivre, juste chaude par habitude d’être ou par le souffle de la clim’… est-ce bien raisonné ? cette vieille pareille à celle du livre. Vous savez, celle qui dit “et voilà ! ” et disparaît à son tour.

        1. adèle

          @Hervé : désolée si je t’ai heurté, je me suis surement mal exprimée, je ne veux pas être dans le jugement.
          Néanmoins j’ai le droit d’avoir une opinion, autre que la tienne, car nos expériences, nos personnalités sont différentes.

          Quand ma mère est arrivée à la fin de sa vie, une aide-soignante est venue m’adresser quelques mots qu’elle pensait chaleureux : “je sais ce que vous ressentez, je suis passée par là, j’ai perdu ma mère etc”
          Mais moi, ça m’a insupporté (je ne lui ai pas dit) : j’ai pensé “mais qu’est-ce qu’elle vient m’encombrer avec son chagrin, ce n’est pas de cela que j’ai besoin, ce que je veux c’est qu’elle prenne soin de ma mère, qu’elle soit gentille et efficace et c’est tout !
          Pour le chagrin , je me débrouillerai avec ma sœur, ma famille ; ma souffrance, ça ne la regarde pas”
          Là où je travaille, il y a plus de 30 morts par an. Des vieux. Il ne m’est arrivée qu’une fois de prendre dans mes bras une fille endeuillée, mais parce que c’était une amie d’études.
          Ce n’est pas parce que je suis indifférente, que les autres, je ne les étreins pas. Ce n’est pas non plus par calcul, par principe ou je ne sais quoi, c’est parce que pour moi, ce n’est pas ma place.

          1. mimi

            Bonsoir Adèle,
            Je ne comprends pas votre ressenti par rapport à ce que vous a dit l infirmière qui s occupait de votre maman. Elle n aurait pas compati, qu auriez vous pense ? La peine, la douleur peuvent se partager. Il me semble que ce partage permet à la douleur d etre moins lourde même si elle est différente pour chacun.
            Bonne soirée

  21. Sorraine

    Il ne faut pas en vouloir aux familles, qui appréhendent leur deuil comme elles peuvent, et souvent mal. La recherche de reconnaissance, c’est une mauvaise idée, jamais suivie d’assez d’effets.

    Après tout, si la Dame leur en a été reconnaissante, elle. Et si elles ont pu faire en sorte que pour elle, ce soit mieux, alors… Tout est bien.

    La famille peut bien les oublier, elles, elles ne peuvent pas oublier qu’elles ont bien fait. Et çà, çà doit compter, devant un miroir, pour elles. C’est mieux que mille louange, la satisfaction d’avoir été droit, d’avoir bien fait. Comparer çà au chien qui gémit, je trouve çà rude, voire abject. Elles ne gémissent pas, elles font. Elles ne sont pas comme le chien, en quête d’une perpétuelle caresse. Elles sont de bonnes personnes, qui ont été payées pour leur travail, et qui l’ont bien fait, même mieux que bien, et çà, aucun oubli ne le leur enlèvera.

    Le sacrifice de son temps ne devrait pas devenir un enjeu de reconnaissance. Et je suis sure que même en sachant çà, elles auraient fait tout pareil. On décide d’être à un moment, quelqu’un de bien, sans se perdre pour autant. Vous parlez un peu à la légère de “vocation”, où je ne vois que du bon sens humain.

    C’est comme si l’humanité, le bon geste, devait forcement être un sacrifice intenable? Je ne crois pas, je crois que le bon geste est le geste heureux. Et je ne crois pas non plus qu’on doive se sacrifier pour le faire! C’est juste ce qu’on fait pour se sentir bien, un humain parmi d’autres. Et certainement pas pour que cela devienne un débat en place publique, ni une raison d’agonir des gens qui péniblement enterrent un membre de leur famille!

    L’ingratitude de la famille n’est qu’un détail, un peu énervant, mais à ranger parmi d’autres détails irritants. Comme un bouchon sur la route, en somme. Parce que si çà se trouve, plein de gratitude, ils sont, mais ils n’y ont juste pas pensé, pris dans des préoccupations plus immédiates, comme essayer de complaire à la grand tante encore en vie, et au beau frère athée, et à… bref!

    Tirer à boulet rouge sur les familles n’augmente certes pas l’intérêt de faire juste son travail correctement.

  22. Hervé CRUCHANT

    “L’ingratitude de la famille n’est qu’un détail, un peu énervant, mais à ranger parmi d’autres détails irritants. Comme un bouchon sur la route, en somme. Parce que si çà se trouve, plein de gratitude, ils sont, mais ils n’y ont juste pas pensé, pris dans des préoccupations plus immédiates, comme essayer de complaire à la grand tante encore en vie, et au beau frère athée, et à… bref!”(sic)

    Je n’aime pas ce commentaire. Pas du tout. Je pourrais détailler mais je dois être beau-frère quelque part et athée, çà c’est sur. Je voudrais seulement dire : on va faire un deal à la dieu-le-fit; on va échanger le deuil de la famille contre la satisfaction du devoir accompli des exemplaires. Donnant-donnant, perdant-perdant. Pourquoi non? Chacun son rôle? Ah, parce que c’est un jeu de rôle ? décidément, je n’ai rien compris à la vie convenue.

  23. marie

    A mon enterrement je ne veux que des âmi(e)s,
    Les bancs paraîtront après que je sois ensevelie.
    Les importuns seront ainsi joliment écartés des agapes
    Les crocodiles garderont du coup,leurs trémolos de retape.
    Et si d’aventure dans mes derniers instants,
    Une compagnie de nymphirmiers* bienveillants,
    Veut verser une larme douce et sincère
    En souvenir d’une malade pas piquée des vers,

    Mais oui ! je dis naturellement mille fois oui

    Ouvrez grandes les portes mes âmi(e)s,
    Qu’entrent mes chouettes virtuoses du tensiomètre
    Mes indulgentes combattives
    Mes frères guerriers
    Je les invite, virtuelle,
    A venir partager un cœur d’hydromel
    Champagne !

    *nymphirmières je l’ai piqué à Mathias Malzieu dans son « journal d’un vampire en pyjama », il dit de très belles choses sur elles

  24. Nicole

    Hervé ! Hervé ‘\ ( ça, c’est un point d’exclamation à l’envers …)
    Belle écriture exprimant (vue de Moa..) un parcours de vie avec plein d’expériences lourdes de joie, de douleur, de difficultés, de partage, de baffes à travers la gueule, d’amour de partout…. Écriture (vue de Moa) empreinte de jeunesse, j’ai cru à un copain de “classe” de Bibi et puis une sœur décédée à 50 ans…. alors vieux monsieur enfin …. moyen vieux plus de 50 qui ressemble à un psychiatre encore en activité. Rigolo les échanges apportés par la toile ! Rigolo, pas forcément drôle! , je veux dire étonnant, scotchant !
    Bref, grande jeunesse dans les réactions épidermiques, quoi qu’il en soit.
    Pour en revenir au sujet de ces 7 abeilles de cœur et d’amour, un remerciement fait “plein de chaud au cœur”, mais si vous êtes un vieux soignant, Hervé vous savez probablement qu’en pleine “souffrance du dedans” combien il est difficile d’ouvrir les yeux plus loin qu’au delà de la petite bulle, toute petite, créée autour du partage des “proches, très proches”, non ?
    J’ai beaucoup soigné, eu qq merci, bp souffert du départ dans les nuages de soleil pour toujours de certains patients, m’en fichais pas mal des éventuels merci, n’osais pas dire que je morflais aussi, en avais-je le droit ?
    Étonnée de la remarque d’une patiente venue en consultation le lendemain des obsèques d’une maman de 32 ans après une leucémie mauvaise et me disant “on a été surpris de vous voir pleuré hier” Eh ben oui, ça a aussi des sentiments un docteur, ça voudrait éviter pour se concentrer sur la résolution des problèmes, mais on ne fait que ce que l’on peut.
    Concernant les funérailles, en 1977, le décès de mon beau-père médecin de campagne, avait été suivi du défilé de tout le village à la maison. Horrible souvenir ! Ma belle-mère avait du redire et redire ce qui l’avait “emporté” à 55 ans, du jour au lendemain sans lendemain !
    Alors pour mon mari attaqué par le crabe à 53 ans et envolé sur le poney multicolore à 55 ans, les filles et moi même l’avons accompagné vers le funérarium avec la famille la plus réduite possible et ne l’avons annoncé qu’ensuite. Beaucoup plus facile à supporté … enfin pour nous. Alors c’est vrai que je n’ai remercié personne ayant eu la chance de pouvoir gérer aussi bien les soins lourds que les derniers instants de partage, mes filles étant également là.
    Histoire de vie
    Histoires de vie
    Perception propre à chaque histoire et à chaque participant, soigné, soignant, témoins proches ou pas…..

    1. adèle

      @Hervé/Nicole
      Oui, la bulle, son effraction par les autres sans qu’on l’ait autorisé, c’est tout-à-fait cela pour moi …

      Alors pour les autres je fais pareil : je respecte leur bulle et j’essaie de leur donner des outils pour la faire éclater, s’ils le souhaitent et au moment qu’ils “choisiront/pourront ”

      @Hervé : “décidément, je n’ai rien compris à la vie convenue.”
      Pour moi c’est pas une question de convention, c’est mon ressenti, c’est tout. Et dans ma tête, il y a plus de questions que de réponses.

      Bises, parce que c’est chouette d’échanger.

  25. Agathe

    Heureusement, moi j’en connais qui savent dire merci ou qui s’intéressent à ces personnes de l’ombre qui sont pourtant des soleils.

  26. Hervé CRUCHANT

    Sympa de me dire que je suis jeune, encore un peu, là…. Un îlot de hargne cérébrale inexpugnable dans un appareillage en voie de déliquescence. Un corps collector, en somme, ‘avec des morceaux dedans’. Soixante douze ans et demi, un mètre soixante quatorze et quatre vingt kilos, PTC.
    Ma petite sœur de cinquante ans, c’était il y a longtemps. C’est au tour de ma fille aînée d’avoir aujourd’hui cinquante et un ans. Ces âges me font l’effet des prix sur les étiquettes : rien du tout. Et les soldeurs ont l’air ravis et fiers de leurs rabais… qui ne me disent rien du tout. Frôle de chose qui doit être tempérée par une tierce personne sinon… Bien sur que j’ai eu mille et une emmerdes dans la vie à cause de çà ! Quand je dis que je n’ai aucun sens de la propriété -en ce qui me concerne seulement, je ne suis pas Proudhon !- c’est tout à fait vrai. J’ai déjà donné mon froc à un type dans la rue, un tee shirt à qui semblait avoir froid (mais c’était une belle connerie, on peut en reparler une autre fois, de celui qui réclâme mais ne doit pas être secouru sinon il perd son dernier pouvoir dans sa vie, celui de réclamer). Je ne veux rien être des mots que l’on pourrait employer comme généreux, partageur, etc. Je préfèrerai, à tout prendre, qu’on me dise fou et excessif; çà me mettrait border line; j’aime être assis sur le bord du monde et balancer les pattes de derrière dans le cosmos en matant les comètes qui passent en faisant les belles…
    Alors, voilà. J’aime aussi discuter, véhémenter, argumenter. En politique, je suinte le propos, débonde l’anathème, vilipende le malfrat et descend les raisonnements comme une épreuve de canoe-kayak aux jeux olympiques; faut que çà pulse ! mais une fois cet île mystérieuse centro-cérébrale gavée à l’adrénaline, je repars dans les rêves et les soft machines…
    Sinon, je considère l’avis et le ressenti d’autrui sans juger. Je refuse sans flinguer, quoi. Et si je dis que j’aime l’humain, qui pourra me croire vraiment quand il m’aura connu ?
    Je refuse, pour moi, la propriété. Je suis allé au bout d’un projet de vie; concevoir et suivre la construction puis faire l’entretien d’une maison, construire de mes mains une piscine…et puis, comme c’était une aire à vivre et pas une aire à battre, le coucou m’a jeté dehors. Alors, j’ai tout laissé là. On me dit que çà arrive assez souvent. Je ne veux pas mourir riche; d’ailleurs je ne veux pas mourir du tout. Athée, je veux aller,au moins, au bout de mon éternité, puisque je n’atteindrais jamais l’immortalité…les jambes balançant dans le vide cosmique, assis sur le rebord du monde.
    Et puis je refuse, pour moi, mais aussi pour que les Autres soient plus heureux d’un pouième, la notion élargie de ‘respect’. Le respect est du à la vie. Toutes leS vieS, c’est à dire LA Vie en général. Vis à vis des Autres, on ne doit avoir ‘que’ de la considération. Et si le respect ne se vend pas par tranches, on peut moduler la considération en fonction du temps, de l’époque, de l’histoire et de chaque individu. Considérer revient alors à accorder de la valeur humaine à chacun. Ainsi, l’opinion de l’autre, amies, ne sera jamais rejetée ici. Inadmissible pour moi peut-être, mais çà ne vous rend que plus humaines.
    Autre sensibilité, empruntée à Albert Jacquard ce grand monsieur disparu dont on voudrait gommer la trace dans le monde philosophiquement correct BHV BHL, celle de la tolérance. Tolérer c’est se placer en juge sympa, coulant, voire laxiste. Tolérer c’est se placer au-dessus, se hiérarchiser, humilier avec conscience et dignité. Je refuse tout çà en bloc. Exemple volontairement sensible : on dit que le gouvernement israëlien actuel consent à discuter de la paix en Palestine avec les Palestiniens. QCM : israël fait-il preuve de tolérance, de générosité, de sagesse ? que pensez-vous d’une négociation entre un ultra dominant et un ultra dominé ? y a-t-il équité ? si cela se pose, y a-t-il tolérance ? de la part de qui ?
    Voyez le schmilblick ! Tant que la considération de l’un par rapport à l’autre et inversement n’aura pas été établie -donc que les deux entités auront reconnues les valeurs humaines comme essentielles et prégnantes sur la haine et le ressentiment- rien ne sera jamais règlé convenablement…et il est évident que chaque gouvernement ‘respecte’ l’autre.
    Quels rapports avec ce dont nous parlions ? mais nous sommes en plein dans le sujet ! Je hais la mort. Et c’est un mot qui me parait bien faible en ce qui la concerne, puisque nous sommes tous menacés d’assassinat surprise par préméditation et par surprise ! et je crois que toute manifestation qui serait conséquente à son action serait un moyen de lui rendre grâce, en quelque sorte. Le mépris et l’ignorance sont de mise. Ainsi, la compassion me hérisse parce qu’elle reconnaît, implicitement, l’impérialisme thanatos. Par contre, entourer, être attentif et non envahissant, choyer, cocooner celui et celle qui sont dans la souffrance….
    Nous voilà revenus à nous, bande de soignantes aimées. Nous, vous, moi. Elles et ils. Tous.
    Çà brule, çà pique, çà assomme plus bas que terre; çà peut vous arracher des amours, sectionner des liens… ‘Çà’ peut… La première chose qu’on fait à un type dans le cirage, c’est de lui piquer un truc dans la cuisse ou le pied, façon croque-mort, pour voir s’il réagit. Nous, on réagit toujours. D’un coup, en douce, dans un coin de salle de repos, dans un coup d’humeur dans le couloir…dans la salle de garde où l’économe fera montrer ses seins à telle ou telle. Où telle ou telle s’en battra les flancs parce qu’elle vient d’assister une gentille dame qui vient de partir sur son poney multicolore et que c’était ainsi.
    Que Mieux vous garde. Et vous aide à me supporter aussi. Merci

      1. Hervé CRUCHANT

        je découvre Y.J. un vrai grand… et quand il a des gestes du grand Jacques Brel, allez, viens, Jef, viens… il est super. quelle authenticité! une fois ou deux, il traduit en live ce que le pense ou ce que je suis. j’ai comme l’impression que tu ne m’as pas écrit ce lien par hasard ! merci, Adèle.

    1. Cath

      “Façon croque-mort”…
      J’ose pas dire d’où vient l’expression, cela ferait rougir la troupe sisisi…
      Mais je suis jalousejalouse de celui qui a pu écrire ” assis sur le bord du monde…et balancer les jambes dans le cosmos…” et tout ce qui suit. Tout comme l’étoile Bleue qui se balade de ci de là en nous saupoudrant de sa poésie débridée. Voilà c’est dit aussi. 😉 Ma seule consolation en ce jour triste, moi je sais faire les smileys. Faut pas grand chose.

      1. marie

        yo , Hervé c’est un pêchauteur, un gars ne ment, un subtil , un extra. Une pause dans ce monde brutal.
        Un exotique. Rouge de blues et bleu de raid, sacré millésime…il chatouille la synapse jusqu’à plus soif , à booooooooire! Tue Dieu d’la mousse, allons! balançons comme lui les jambes dans le cosmos, jusqu’à perpette.
        A le suivre dans ses méandres on y perd vite son north, son french, ses clés…( à molette é-vi-dem-ment) mais grave on l’aime!!!! Ah Bibi merci pour tout ça .

  27. Ôde

    Je comprends qu’elles aient été touchées… Elles ont été présentes… Mais voilà, bon nombre de familles pensent qu’on ne fait QUE notre boulot (pas toutes heureusement)… Je suis orthophoniste et je n’interviens qu’à domicile pour des pathologies lourdes (AVC, Parkinson, Alzheimer, tumeurs cérébrales, et toute maladie neuro-dégénératives moins connues), je croise les infirmières et les kinés hyper impliqués… Et je ne peux laisser croire aux familles qu’on ne fait QUE notre métier !! On entre chez les gens, on partage leur intimité, parfois beaucoup plus que la famille… On reçoit les joies, les peines, les frustrations, les colères… Et à chaque fois, on revient… Mais pas parce que ce n’est QUE notre métier… Mais parce que nous sommes humains, nous nous attachons, nous sommes parfois le seul lien… Alors quand la famille nous occulte, c’est une douleur !!!
    Alors, mesdames les infirmières de mme Bella-Jacqueline-Jacquie, je vous remercie de tout ce que vous faites pour tous ces patients, et je remercie aussi tou(te)s vos collègues pour ce travail que vous faites, avec abnégation, courage, générosité !!! Aujourd’hui je m’exprime en tant que “collègue” paramédicale mais aussi en tant que fille d’un papa ayant fait 3 AVC et qui bénit les infirmières et infirmiers qui prennent soin de lui chaque jour depuis 25 ans !!!

    1. Madame Pivoine - Natacha

      Que votre boulot?
      Mais il y a de l’affect dans votre boulot, alors forcement, c’est pas comme si vous fabriquiez des stylos bics à la chaîne … 😉

      1. Libellule

        Allez savoir où se cache l’affect !
        J’ai soigné une dame qui mettait les élastiques sur les poulets à l’abattoir depuis 40 ans, elle avait l’amour du travail bien fait parce que “ce poulet, il n’a vécu que pour ça, il faut que les gens aient envie de l’acheter, le mangent avec plaisir et pour ça l’aspect visuel c’est important, et c’est l’image de l’entreprise, ça doit être une belle image”…
        … Et côtoyé un chirurgien qui ne voulait pas voir ses patients ni avant ni après, seule la technicité de l’opération l’intéressait…

  28. lectrice boulimique

    quand mon père est décédé, je garde un souvenir magnifique des deux infirmiers (une femme, un homme) qui l’ont et nous ont veillé. Je dis “nous” car nous étions présents autour de papa agonisant mais sans l’infirmier de garde qui faisait sa ronde et se tenait à notre disposition pour cette dernière nuit, nous n’aurions peut-être pas tenu le coup moralement jusqu’au bout.
    je me souviens aussi du sourire magnifique qui a fleuri sur le visage de l’infirmière quand je lui ai dit qu’à la messe de funérailles nous dirions une intention de prière pour elle, pour son collègue et pour le personnel soignant de l’institution.
    Même si on ne croit pas aux mêmes dieux ou aux mêmes choses, partager un simple merci est toujours bienvenu, je pense.

  29. Madame Pivoine - Natacha

    Dans mes boutiques, je reçoit parfois/souvent des clientes infirmières qui viennent chercher un petit présent pour leurs patient(e)s. Un anniversaire, une petite attention, un brin d’amour.
    Elles ne gagneront pas plus ni moins par ces petites attentions. Peu leur importe.
    Parfois le présent est plus gros quand la personne rejoint les poney et les licornes. Et chaque fois mon estomac se noue pour ces professionnelles qui malgré tous leurs efforts, voient partir des êtres aimés.
    1000 Merci donc à cette Team Bagarre qu’on a oubliée !!!
    La bise.

  30. Nicole

    @Hervé “Ainsi, la compassion me hérisse parce qu’elle reconnaît, implicitement, l’impérialisme thanatos. Par contre, entourer, être attentif et non envahissant, choyer, cocooner celui et celle qui sont dans la souffrance….” Tout à fait d’accord ! Compassion, ( souffrir avec) et empathie (souffrir avec, itou ! ), pour moi, non ! Chaque fois que j’ai été dans le ressenti charnel de la douleur de l’autre, j’ai été mauvais aidant ! Par contre reconnaître cette douleur et le faire savoir à celui qui souffre, être à l’écoute de tout ce qui peut être verbalisé, aussi décousu et peu cohérent que cela puisse paraître, accueillir les mots de l’autre, éviter de tout rapporter à soi ( difficile, nous sommes à nous mêmes une référence de vécu) chaque expérience sera différemment reçue par deux individus différents, entourer sans s’imposer et puis, si tout cela est suivi d’un merci tant mieux, sinon bof, cela compte peu…. pour moi. J’accepte que d’autres puissent y trouver un juste retour sur “dons”, j’ai la chance de pouvoir m’en passer ….

    1. Hervé CRUCHANT

      oui, Nicole. c’est l’un des paradoxes, pire : une des contradictions de la vie. il y a des choses qui viennent spontanément et naissent d’un élan d’humanité…voir la détresse et vouloir aider un peu. Mais, devant celui ou celle dont la vie vient de casser comme bois sec, dire spontanément “je vous comprends. quand j’ai perdu ma mère…”. mais qu’est-ce qu’elle en a à foutre de la mort de ta mère? entretenir la mort, graisser les essieux de la carriole à l’Ankou? mais où est-on, là?
      je voudrais dépasser cette gluance qui spontanise de mon cerveau reptilien. et dire à l’autre, muet de larmes et de sanglots : “viens, toi, frère, sœur, viens. on va aller dehors, loin d’ici. on va entrer dans le premier bistrot. pour parler d’elle ou lui, à peine froid, que tu aimais tellement. dis-moi ce qu’il était, dis-moi ce que tu vas en faire peut-être, je devinerai ce que tu en fera surement. et si des sanglots viennent t’étouffer par derrière, cachés derrière un souvenir, derrière le tas d’années feuilles mortes sur le vert de ta vie d’avant…si c’est comme çà, je prendrais ta main et te dirais ‘je suis là, je suis là, donne moi tout çà qui t’encombre, je le jetterai tout à l’heure en passant la Garonne; et çà partira en mer, loin loin, là où tout se règle dans le soleil, l’embrun et le vent’. mais voilà. ce n’est pas comme çà qu’il faut faire. et on ne sait pas quoi. alors le silence s’insinue et gagne du niveau, monte, monte, devient dense, dur. nous sépare. sans qu’on ait pu dire ici merci pour tous vos soins; et là répondre c’était quelqu’un de bien…

  31. Vizzarri

    Un médecin rencontré juste une fois l’été dernier en urgence un dimanche soir d’orage après avoir composé le 15 car peur que mon p’tit garçon fasse un œdème de Quinque… Vite! Pas une minute à perdre!
    En short, croc’s et coupe-vent et 7 km plus tard, nous voilà arrivés dans son cabinet! Ouf! Le visage n’a pas plus enflé ni son cou et les plaques rouges ont presque toutes disparues! J’explique les symptômes plus sereine à ce médecin calme, souriant, bienveillant. Il me demande gentillement si j’ai changé de lessive, s’il a ingéré un aliment qu’il ne mange pas d’habitude… Je réfléchis et pense éventuellement à la cannelle sur ces céréales qu’il voulait tellement malgré ma réticence… Passons… Nous en sommes venu à discuter de pommes, de pesticides… Un médecin prenant le temps d’écouter ses patients, un homme pour qui ce métier voulait dire quelque chose… J’ai appris par hasard lors d’une discussion avec une pharmacienne qu’il était parti en avril dernier… Accident de moto… Un frisson m’a parcouru… Les mots nets se sont arrêtés… Je ne m’étais pas trompée : ce médecin était une belle personne visiblement qui aimait son métier, qui aimait les gens tout simplement:)

  32. Lily G.

    Comment se sentir si dévalorisée quand on passe la plus grande partie de notre temps à aider les gens. Vieux, jeunes, moches, acariatres, vicieux, gros ou gras, coquettes, beaux, gentils, perdues, soulagés, …
    Tant de personnes, tant de caractères. Mais dans l’adversité, dans la maladie, dans l’accompagnement, on est tous à la même école. Hélas pas dans l’humanité.
    Etre soignant est éprouvant et rares sont les moments ou nous nous sentons remerciés, gratifiés.
    Rares, mais pas absents. Un simple “merci”. Ce n’est pas demander la lune. C’est une attente humaine. Une réaction normale. Et quand ce petit mot franchi les lèvres, alors on pourrait décrocher la lune, et l’offrir à tous ces gens qui remontent le moral, à toutes ces personnes qui ont un peu de reconnaissance.
    Un sourire. Un coeur gonflé de joie. Un sentiment de puissance.

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