Au bord.

(L’histoire c’est H., IMG, l’écriture c’est moi. Juste merci)

Alors voilà une escalope de dinde. Ou une tranche de poulet.

[Et cela c’est ce qu’on appelle une surprenante entrée en matière ! Il faut savoir surprendre ses lecteurs…]

Donc, notre escalope. Elle repose dans sa barquette blanche.
Entre la viande et la barquette : ces fins papiers absorbants, mélange entre la mousse et le papier buvard.
Ces papiers, vous, moi, on n’y prête pas attention.

Alors voilà Mr U. qui n’est ni une dinde, ni un poulet. Mr U., SDF, ramasse ces petits papiers et les entrepose précieusement.
Mr U. est ce que Victor Hugo appellerait “un Mendiant”.
Comme tant d’autres, U. a des escarres talonnières et malléolaires. Ça lui fait mal. Entre ses vieilles chaussures et sa peau à vif, il cale ce petit papier ensanglanté que nous jetons sans réfléchir, que nous ne remarquons pas.
Ce papier, pour nous, à vrai dire, il n’existe pas.
Pour lui, pour cet homme aux bords du bord de notre monde, c’est un pansement, c’est un antalgique, c’est une protection contre les bords de sa chaussure qui frottent et mordent ses pieds au sang.
Ce petit bout de rien, pour lui, ça compte.

Que ferait Victor Hugo en 2013 ? C’est la crise : il parlerait probablement de nos sans-logis. Génie et voix des indigents…
Et le génie s’étonnerait VRAIMENT de l’étrangeté de notre société.

Étrange société où un homme récupère dans les poubelles des barquettes de viande qu’il ne mangera pas.

Étrange société qui transforme les pieds des clochards en escalope de dinde ou de poulet.

Victor Hugo, Les pauvres gens :
Jeannie annonce à son mari le décès de leur voisine qui laisse deux orphelins. Elle voudrait les recueillir mais elle a peur de sa réaction.
Lui, de répondre :
– Quand il verra qu’il faut nourrir avec les nôtres
Cette petite fille et ce petit garçon,
Le bon Dieu nous fera prendre plus de poisson.
Moi, je boirai de l’eau, je ferai double tâche,
C’est dit. Va les chercher. Mais qu’as-tu ? Ça te fâche ?
D’ordinaire, tu cours plus vite que cela.
– Tiens, dit-elle en ouvrant les rideaux, les voilà!”

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4 réflexions sur « Au bord. »

    1. Emel

      Peut-être pas seulement nos chaussures… Peut-être aussi un regard, un vrai pas un fuyant, peut-être aussi un sourire, discret peut-être mais un vrai… je crois que tu as raison, ce serait mieux

      1. lmlavie

        J’irais même plus loin…Pourquoi ne pas s’asseoir auprès d’eux et échanger quelques mots…Ne jamais perdre de vue que derrière l’apparence se cachent des êtres humains qui ont eu parfois une vie tellement riche…
        Pour en avoir côtoyé dans une autre vie,je sentais bien les regards inquisiteurs(de ceux qui les ignoraient), lorsque la ”pimbêche”que j’étais les embrassais…
        Je faisais tâche à côté d’eux, semblaient-ils dire…..!
        Ils ne sont que le reflet de nos propres angoisses et les mentalités ont encore besoin d’évoluer,oh combien…!
        Personne ne m’a jamais demandé la moindre pièce car chacun avait bien compris que je n’étais pas là pour ça…..

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